Ton souffle rentre au poème


ton souffle rentre au poème comme à la maison
alors écrire
écrire par les contours
sculpter le silence avec les sons
envelopper les mots et les formes d’immensité
oser la blancheur de la page, l'opacité des choses


poser l’oreille contre le mur du silence en prenant appui sur les mots
créer une partition de vibrations rendant palpable l'invisible, les émotions
relier l’infiniment petit à l’infiniment grand

écrire donne le pouvoir de s’approcher si intimement des gens — plus que permis — qu’on se loge au cœur même de leurs contradictions, sans jugement, sans raison. On éprouve une sorte d’amour inconditionnel. Dangereux amour dont seul le poème peut nous relever

le poème est cet instant photographié dans les effondrements de l'émotion. Il rend présent ce qui déjà n'est plus

le poème est l'éclair qui répercute la foudre, qu'elle soit tombée hier, il y a dix ans ou bien dans les cinq secondes qui suivent

seule la poésie peut réconcilier l'irréconciliable dans la brèche de silence qu'elle impose entre des forces contraires


par sa force intérieure, celle des mots habités de souffle, le poème nous maintient debout malgré toutes les déflagrations et les chutes dont il garde trace

le poème a la nudité comme armure


L.M.

Texte présenté en amont du 24ème 
Festival international de la poésie de Medellin (Colombie) 
en juillet 2014.

Peinture de Marie-Odile Thirion





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