Sémaphore 5

derrière les portes se bousculent des rayonnements déjà bien vieux  
le foulard craquant de sel pousse la force, m’aide à tenir parmi les autres constellations du temps et je te porte, lourde ta chair pèse des tonnes à soulever, cisaillant le paysage, j’en crie l’étouffement du soleil ; ta peau tendue dans l’énormité du mouvement connaît si bien les distorsions de l’univers que lorsqu’on a grandi dans tes plis, on ne sort jamais de cette étendue va-et-vient qui ne craint pas de fendre la vie en deux, sans pitié pour les barques, les grincements des pierres, les chevaux en cercle activant la vieille corne de brume, leurs sabots, les moutons pas même blancs sous le moulin à orge attachés aux troëls an douar hogar merhed, comme si ça allait de soi d’unir la terre et les femmes par la courbe d’une houe ; c’était écrit pourtant dans les vents ces livres ouverts dans les yeux des vieux, quand souffle le vent d’ouest allez à la grève avec votre croc, fléaux-frailh-panier-de-paille-kest-râteau-à-grains-fourche-de-bois-récolte-de-mottes-pour-les-mois-noirs — grand-père qui dit ça, comme si ça allait de soi, pa vezan aol e merenn kornog, it d’an aol-men gand ho krog, que j'aille ramasser le goémon sur la grève au lever du jour — après que le vent morde à mes genoux, j’irai à la grève faire rouler le goémon sous mon croc
ils sont venus s’aimer en nous, me dis-tu, crocs du soleil dans la nuque 

© Laure Morali, "Sémaphore"_10 avril 2011 

Commentaires

Articles les plus consultés